Comment a démarré l’aventure Déjà Bu ?
Sarah Missaoui : c’est par hasard lors d’un apéro chez des amis que j’ai découvert le gin tonic sans alcool en juin 2022. Je ne bois pas d’alcool et, pour la première fois, j’ai eu l’impression de boire une vraie boisson sans alcool pour adultes. J’étais alors journaliste en audiovisuel et mon idée première était donc d’enquêter sur ces boissons sans alcool pour pitcher une idée de documentaire sur ces nouvelles boissons. Mais l’enquête est devenue une étude de marché qui a finalement débouché sur un business plan. Quand j’ai vu le nombre de boissons qui existaient mais qui n’étaient pas disponibles sur le marché français, j’ai décidé de devenir caviste-bar sans alcool.
Je suis devenue entrepreneuse presque malgré moi, portée par la passion de la découverte de ce nouvel univers. Ma boutique a ouvert il y a un an en février 2023.
Vous faites partie des pionniers sur ce marché ?
S. M. : je suis très contente de faire partie des pionniers du sans alcool en France. Et je suis la première et encore la seule à proposer un concept à la fois de cave et bar en France. En effet, quand j’ai mené mon enquête sur ce marché, je me suis rendue compte qu’il était impossible d’en goûter, sachant que le prix moyen est élevé, aux alentours de 30 € la bouteille pour un spiritueux sans alcool. J’avais la frustration qu’il n’y ait pas un lieu à Paris pour tester ces produits sachant que les bars sans alcool existent à Londres. En France, il n’y a encore que des caves sans alcool. Quant aux restaurants et bars traditionnels, ils ne proposent pas encore ces boissons dans leur carte.
Quelle est la complémentarité de vos deux activités ?
S. M. : le bar permet la découverte de ces boissons, encore insuffisamment connues des Français. Quant à la cave, elle permet de me positionner comme un véritable commerce de proximité pour les habitants du quartier. L’activité se répartit à 30 % sur le bar et 70 % sur la cave.
Quelle offre proposez-vous ?
S. M. : la législation en France autorise sur l’étiquette la mention sans alcool sur une bouteille qui va contenir moins de 1,2 % d’alcool. J’ai choisi de me positionner exclusivement sur le 0,0 %. L’assortiment de la boutique comporte à peu près 80 références aujourd’hui. Il se compose d’un tiers de vins et pétillants, de 15 % de spiritueux, de 15 % de prêt à boire (cocktails déjà prêts, cidres, bières), d’apéritifs spécifiques (gingembre, fleur de sureau, verjus, orange amère…) et enfin des boissons de type maté, kombucha… En termes de provenance, nous mettons à l’honneur le Made in France puisque 99 % de l’assortiment de la cave est français. Côté fournisseurs, je privilégie les petits fournisseurs, à savoir les start-up pour les spiritueux et les domaines viticoles pour les vins sans alcool, car travailler un cépage, c’est un vrai métier.
La catégorie est en plein boom ?
S. M. : il y a une vraie effervescence autour de cette catégorie de produits. Au salon Wine Paris, de plus en plus de domaines viticoles avaient dans leur gamme, cette année, une proposition de vin sans alcool. Par ailleurs, le salon du sans alcool Degré Zéro s’est tenu pour la première fois en France le 11 février dernier et a attiré les foules.
Quel est votre positionnement prix ?
S. M. : le niveau de prix des boissons désalcoolisées est plus élevé, d’où l’importance de pouvoir tester avant d’acheter. Nos vins sans alcool sont aux alentours de 12-13 € sauf pour le Montagne-Saint-Émilion (Prince Oscar) millésimé qui est plus cher (entre 25 et 28 €). Pour les pétillants, le prix est aux alentours de 12 € pour un mousseux ou un crémant, et grimpe jusqu’à 30 € pour un champagne moyen de gamme.
Comment développez-vous votre notoriété ?
S. M. : le bouche-à-oreille a été mon premier vecteur de communication. Je communique également via les réseaux sociaux. La boutique est devenue un local de destination grâce aux retombées d’une vidéo en juillet dernier qui a fait 1,7 million de vues sur Instagram et TikTok. Par ailleurs, j’ai eu un pop-up éphémère pendant 2 mois en décembre-janvier pour les fêtes de fin d’année et le dry january au centre commercial Beaugrenelle. Enfin, j’ai gagné, en décembre, le concours du commerce indépendant organisé par Envi et la marketplace Faire. Ce prix, remporté après seulement 10 mois d’existence, est une superbe reconnaissance qui m’a redonné un élan et la confiance dans mon projet.
Quel est le profil de vos clients ?
S. M. : le profil des clients est varié et ne correspond pas forcément à ce que j’avais imaginé. Je m’attendais à une cible de clientèle essentiellement composée de femmes enceintes et de personnes qui ne boivent pas d’alcool. En fait, les trois-quarts de mes clients sont des personnes qui consomment de l’alcool et qui veulent mieux et moins consommer. Le cœur de cible, ce sont les trentenaires actifs et sportifs qui font attention à leur ligne et à leur alimentation. Et les boissons sans alcool, moins sucrées et moins caloriques, répondent parfaitement à cette demande.
Avez-vous atteint vos objectifs ?
S. M. : j’ai dépassé de 50 % ce que j’avais prévu de faire en chiffre d’affaires dans mon business plan pour la première année. Mon objectif est de faire le double en 2024.
Quels sont vos projets ?
S. M. : je réfléchis à ce que je pourrais faire pour les JO. La boutique est située dans une rue assez passante et il est question que celle-ci soit piétonisée. Si c’est le cas et que j’ai la possibilité d’installer une grande terrasse temporaire, je vais me concentrer sur mon lieu. Si ce n’est pas le cas, j’aimerais avoir un ou deux points de vente éphémères près des enceintes sportives. Pour la première fois pour les JO, il n’y aura pas d’alcool dans les enceintes sportives, donc un beau potentiel de démocratisation pour la catégorie NoLo !
Fiche d’identité Dénomination : Déjà Bu ?
Activité : cave & bar sans alcool
Création : février 2023
Superficie : 60 m² dont 20 places assises pour la partie bar
Web : www.dejabu.shop